Trop, c'est trop !
Les Français ont parlé, sans ambiguïté. L’abstention au premier tour des élections législatives a été historiquement basse. Trompés et déçus par des gouvernements plus ou moins au centre du spectre politique, ils ont voté, avec une majorité relative, pour le Rassemblement National.
Les motivations sont nombreuses, mais l’obsession principale de ce parti est l’immigration, suivie de près par l’insécurité ; l’une serait même liée à l’autre.
Personne ne se plaint de l’épicier qui sert ses clients tard le soir, même le dimanche, quand tous les autres commerces sont fermés. Personne ne se plaint du livreur qui achemine le repas en pédalant sous une pluie battante. Personne ne se plaint du médecin qui s’est implanté dans un désert médical.
En revanche, on a le plus grand mal à consoler les victimes de viol dont les agresseurs étaient sous OQTF (Obligation de Quitter le Territoire Français), car ces derniers n’auraient pas dû être là. Avec des si, on met Paris en bouteille, certes ; mais les crimes facilement évitables offensent plus que les autres. Pire, les méfaits commis par des étrangers sont plus visibles que les autres, puisqu’on peut les mettre dans une case bien plus étroite que celle de nos compatriotes, ce qui exacerbe le fameux « sentiment d’insécurité ».
Malheureusement, notre pudeur antiraciste nous interdit d’étudier ce qui se cache derrière les chiffres du Ministère de l’Intérieur qui semblent établir une corrélation (mais pas une cause) entre les vols et violences et les étrangers, massivement surreprésentés parmi les coupables, particulièrement en Île-de-France, particulièrement dans les transports en commun.
Ceux qui ne souffrent pas d’entendre que ces derniers respectent moins la loi que les Français, jubileraient pourtant si une étude sérieuse concluait à un racisme systémique dans les forces de l’ordre. C’est effectivement une raison possible au phénomène, alors pourquoi se bander les yeux ? Que craint-on, exactement ? On identifierait peut-être aussi la pauvreté, les pères absents, les mères surmenées, le manque d’éducation, le fossé culturel, la ghettoïsation, et j’en passe… même le racisme des autres, pourquoi pas ! Si l'on considère que seuls les blancs sont racistes, finalement, on retombe, par définition, dans des considérations… racistes. Plus probablement, on identifierait un ensemble de facteurs, un cocktail explosif. Alas, en l’absence d’une bonne raison, on risque de ne rien voir d’autre que la couleur des incriminés. Je prétends qu’on perd plus à faire l’autruche qu’on n’y gagne.
De façon anecdotique, on peut se pencher à nouveau (on espère, une dernière fois) sur l’affaire Nahel. On se demandait depuis un an pourquoi un adolescent conduisait sans permis, à grande vitesse, un puissant véhicule, mettant en danger de nombreux usagers de la voie publique ; pourquoi il avait risqué sa vie, et celle des autres, en ignorant les injonctions de la police.
Le discours prononcé par sa mère lors de la marche blanche commémorant le premier anniversaire de l’événement, le 29 juin 2024, entourée de jeunes hommes masqués et cagoulés (on se demande bien pourquoi), répond assez clairement à cette question, pour peu qu’on daigne y faire attention.
Le passage qui nous intéresse a été censuré par les médias ayant relayé l’information (de ce que j’ai pu observer : l’Agence France Presse, Le Parisien, Le HuffPost), à l’exception (on ne s’en étonnera pas) de CNEWS et de Français de Souche, médias de droite, voire d’extrême droite. L'agence CLPRESS, qui se dit indépendante, diffuse le passage en question sur YouTube dans une beaucoup plus longue vidéo :
« Un refus d’obtempérer ? Qui n’en fait pas ? Dites-moi qui n’en fait pas dans la vie ? Qui conduit pas sans permis ? […] Pas mal de gens conduisent… tout le monde, tout le monde ! On a tous essayé de conduire en défaut de permis… On a tous appris à conduire sans avoir le permis, je vous promets. Y en a un qui me dit non, bein je le croirai pas. […] Faut éviter les morts, ils vont continuer à nous tuer. »
Je propose une solution très simple : ne pas conduire sans permis, ou sans la supervision d’un moniteur de conduite ou d’un adulte détenteur du permis dans le cadre d’une conduite accompagnée ; respecter le code de la route et les forces de l’ordre ; et éduquer ses enfants dans ce sens. Comme tout le monde, pensais-je naïvement ; manifestement pas. On ne peut pas crier au meurtre sans prendre ses responsabilités. La preuve est faite que nous vivons dans des mondes très différents. C’était une telle évidence qu’on en doutait.
Mais revenons-en à nos vilains petits canards. En affirmant que le sujet de l’insécurité serait réglé en coupant totalement les vannes de l’immigration, le RN promet d’appuyer sur le bouton nucléaire pour tuer une mouche. En additionnant les chiffres de la délinquance étrangère, on s’apperçoit qu’environ 99% des étrangers présents sur le sol français sont, à priori, d’honnêtes gens. Mais puisque la plupart des autres partis politiques refusent d’admettre l’existence même d’un problème, le Français moyen n’a d’autre choix que de voter pour la solution extrême (oserais-je dire, finale ? Je persifle) : la xénophobie, littéralement la peur et le rejet de celui qui vient d’ailleurs, à défaut de mieux.
Ne méprenez pas mon analyse de la chose : il y a de bonnes raisons de limiter l’immigration (et il y a de bonnes raisons d’en conserver une partie, notamment pour satisfaire certains besoins).
La crise actuelle du logement affecte tout le monde, hormis les plus aisés. Le nombre de sans-abris à Paris a doublé en moins de 10 ans. Nous « accueillons » des milliers de gens fuyant la misère, dans des conditions absolument indignes. La mesure la plus humaniste serait de n’accueillir que ceux que nous sommes capables de loger et de nourrir. Sans oublier de loger, et de nourrir, les Français, d’abord, quelles que soient leurs origines. Parce que malgré notre Déclaration universelle des droits de l’homme, on comprendrait mal pourquoi des citoyens seraient à la rue pendant que de nouveaux venus dormiraient à l’hôtel. Comment peut-on décemment s’occuper des autres quand on n’est pas capable de s’occuper de soi?
Pour terminer, je m’adresse aux champions de la sacro-sainte Démocratie et de nos valeurs « républicaines » (ça ne veut rien dire, mais passons) : Edwy Plenel de Mediapart en tête, les macronistes et le Nouveau Front Populaire. Le processus démocratique attendu est l’expression des valeurs de chacun. Nous sommes censés voter en faveur des convictions qui sont les nôtres. Or, en faisant « barrage » au RN (et de la même façon, en faisant barrage au NFP, comme beaucoup se sentiront obligés de le faire), on ne vote pas pour ses valeurs, on vote contre celles des autres. Voilà une forme assez perverse de la démocratie, qui risque de donner le sentiment d’une élection volée à la majorité relative dont on a refusé le vote par des artifices électoraux, des alliances plus ou moins contre nature.
Après avoir été gouverné par la gauche, par la droite, et par le centre, on verra, dimanche, le résultat de 50 ans de politique du « tout ou rien ». Et si ce résultat n’est pas aussi grave que certains ne l’anticipent, les élections de 2027 devraient en inquiéter plus d’un.
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